Trônant, telle une précieuse relique, en plein centre de la scène désertée par les membres de la garde princière, la carte d’Amilenon s’étendait de toute sa grandeur devant le regard intéressé des occupants de la Grand-Place.
Une fine couche de tissu transparent protégeait le tracé délicatement dessiné sur un parchemin jauni par le temps. C’était la première fois que Salomon voyait une carte entière d’Amilenon et il fut surpris de constater l’immensité des terres situées à l’est d’Eniopor. A vrai dire, il n’avait jamais exactement su quelle était la taille d’Amilenon, ni même celle du royaume d’Enioma. Jusqu'à présent, sa vision du monde provenait de la lecture de journaux feuilletés et des nombreuses histoires que les bardes contaient le soir venu.
Salomon s’extasia ainsi plusieurs minutes devant la carte. De l’extrémité occidentale d’Amilenon jusqu’aux Monts Protecteurs, une attention toute particulière avait été accordée aux détails du paysage. Montagnes, vallées, forêts, océans et mers intérieures étaient magnifiquement représentés. Cependant, une fois le regard passé à l’est de l’imposante chaîne montagneuse du centre d’Amilenon, de larges sections vides ou maladroitement dessinées contrastaient avec le reste de la carte. On ne pouvait distinguer que quelques villes et très peu d’indications sur la topographie ou les routes locales.
Salomon essayait de déchiffrer tant bien que mal les petites inscriptions déposées ici et là et recherchait tout particulièrement l’emplacement des Terres Limitées. Quelques clignements d’yeux plus tard, il préféra demander l’information à une des autres personnes scrutant la carte
- Ici, mon brave, indiqua l’individu en désignant le point le plus oriental de la carte. Son doigt reposait sur une inscription presque effacée, au-dessus de laquelle s’étendait un vaste espace vide de toute écriture ou dessin.
Vincent T MORVAN - EDITIONS SATINVAË - NOVEMBRE 2020